« Je ne veux pas laisser de trouble à mes enfants…»

On entend souvent la formule suivante : « Je ne veux pas laisser de trouble à mes enfants ». C’est la sagesse qui parle. En précisant nos volontés relatives à nos arrangements funéraires que ce soit dans un testament, des préarrangements ou dans tout autre écrit, on s’assure qu’elles soient respectées et on évite ainsi de possibles discussions et déchirements inutiles dans les familles (« Maman méritait bien cela » ou, à l’inverse, « Non, non, on dépense le minimum, gardons-en plus pour nous »).

Quand l’amour et la bonne entente règnent, il n’y a évidemment pas de difficulté. Ce n’est malheureusement pas toujours la réalité au quotidien. Avec l’éclatement des familles, les mésententes débutent souvent au salon funéraire.

On pourrait penser à l’exemple où les enfants du défunt divorcé et la nouvelle conjointe de fait ne s’entendent ni sur qui peut faire le choix des arrangements funéraires ni sur le choix proprement dit de tels arrangements funéraires. Ils sont tous présents dans le bureau du conseiller et la tension monte.

En tant que notaire œuvrant pour un salon funéraire, j’agis alors à titre de conseiller et souvent de médiateur pour les familles vivant de telles mésententes. Il faut alors agir avec doigté et impartialité, sans s’immiscer dans la dynamique familiale et dans le plus strict respect de la loi.

Ce qu’en dit le Code civil du Québec

Suivant l’article 42 du Code civil du Québec, le choix des funérailles et du mode de disposition du corps (crémation ou embaumement du corps et inhumation) appartiennent à la personne concernée. À défaut de volontés exprimées par le défunt, il faut s’en remettre à la volonté des successibles ou héritiers qui sont tenus d’agir.

Après avoir discuté avec la famille et expliqué la teneur de l’article 42, nous vérifierons l’existence ou non de volontés exprimées par le défunt. Ces volontés peuvent s’exprimer par tout écrit revêtu ou non de la forme testamentaire savoir un testament, des préarrangements funéraires ou tout autre écrit à cette fin. En l’absence d’un tel écrit, ce sont les héritiers ou successibles qui décident. Or, la conjointe de fait ne se qualifie pas à ce titre à moins d’un testament qui la désigne à cet effet.

Dans notre exemple, Monsieur a désigné dans son testament sa conjointe comme seule héritière et liquidatrice de sa succession. C’est donc elle, à l’exclusion des enfants, qui choisira les arrangements funéraires, en respectant cependant les indications du défunt à cet effet dans le testament. En l’absence de testament, les enfants (les successibles au sens de la loi) auraient pu décider des arrangements à la majorité d’entre eux.

Mon expérience comme notaire depuis plus de 15 ans dans une maison funéraire m’enseigne que nombre de malentendus et de mésententes familiales auraient pu être évités si le défunt avait pris soin de consigner et faire connaître ses volontés.

Parlez-en à vos proches

Si vous avez consigné ces volontés dans votre testament, n’hésitez pas à en parler puisqu’il est possible que l’on retrace votre testament plusieurs jours après les funérailles. Il serait fâcheux (!) que l’on vous incinère et que vos cendres soient répandues aux quatre vents, alors que vous auriez souhaité être embaumé et que votre corps soit inhumé en pleine terre.

N’hésitez pas non plus à donner à votre notaire des instructions précises sur le sujet ce qui évitera que cet aspect de votre testament se limite à une formule laconique du genre « Je laisse le soin à mon liquidateur de voir à mes arrangements funéraires » ce qui signifie que c’est votre liquidateur qui va choisir et non vous.

Une autre excellente façon de faire valoir vos volontés est d’acheter des préarrangements puisqu’encore là c’est vous qui décidez. La formule est simple, vous payez de votre vivant pour un service qui sera rendu à votre décès. Une partie des sommes d’argent confiée à la maison funéraire doit être déposée en fidéicommis et ce n’est qu’à votre décès qu’elle pourra être retirée. Nous aborderons ce sujet plus en détail dans une prochaine chronique.

N’hésitez pas à en parler, ça ne fait pas mourir !

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Christiane Ratelle, notaire